Paul-Louis Courier

Courrierist, lampooner, polemist
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prec Sans mention de Rome 28 janvier 1811 A M. et Mme Clavier, à Paris Sans mention après le 28 mars 1811 Suiv

Rome, le 28 janvier 1810


J Journal de l'empire Journal de l'empire - 1er juin 1811
 
e n'ai pu répondre plus tôt à la vôtre du 10 novembre, ni vous envoyer le chiffon que demandait ce directeur de la librairie, ni vous remercier comme je le voulais de vos bons offices auprès de Son Excellence, tout cela parce que j'ai eu mal au doigt ; mais un mal qui me privait de mon bras et qui a duré deux mois ; et pendant que j'attendais ma guérison pour vous écrire, il a écrit, lui Directeur, ici au Préfet, disant, comme il a dit à vous, qu'il voulait avoir cette copie du supplément de Longus, et qu'il lâcherait aussitôt mon livre bleu[1] qu'il a saisi. J'ai vite donné toutes les copies dont je me suis pu aviser, non pas pour ravoir ma brochure, car à vous dire vrai je ne m'en souciais guère, mais pour me tirer de la gueule du loup, et je pense que voilà qui est fait. Ne croyez pas pourtant, Madame, que je me sois fort tourmenté des disgrâces de ma Chloé. Je n'en ai pas perdu un coup de dent ni une partie de volant quand j'ai trouvé des joueuses comme mesdemoiselles vos filles. Cela est rare malheureusement, et surtout ici. Les demoiselles, en Italie ne jouent guère au volant, elles ont des pensées plus sérieuses, et l'amour n'attend pas le nombre des années[2], aux filles bien nées , s'entend, comme elles sont toutes en ce pays-ci. Vraiment il y avait du bon dans nos commentaires sur Racine, et je suis ravi, Madame, que vous vous en souveniez. Je ne l'entends bien, pour moi, que quand je le lis avec vous. Je veux dire quand c'est vous qui me le lisez. Nul autre ne devrait s'en mêler. Je ne pense pas toutefois que vous l'ayez beaucoup étudié. Mais c'est qu'il a écrit pour vous et vos pareils. Vous avez le sentiment inné de ses divines beautés, et cela vaut mieux que le feuilleton[3]. J'ai furieusement dans la tête le pèlerinage d'Athènes, et si cette dévotion me dure, je pourrais bien partir au printemps. Le fait est que je veux avant de mourir, voir la lanterne de Démosthène et boire de l'eau d'Ilissus[4], s'il y en a encore. Voilà ce que je rêve à présent. Ce qu'il en sera est écrit aux tablettes de Jupiter. Piranesi est venu, et ne m'a point porté votre ouvrage. J'ai fort cherché celui que vous m'avez demandé, Symbolœ litterariœ[5] ; cela ne se trouve plus ici. Le fonds de Pagliarini[6] est passé à Naples. Vous a-t-on remis une demi-feuille de notes sur Longus. C’est une espèce d’errata nécessaire pour compléter votre exemplaire. Faites-le demander chez Madame Marchand rue des Bourdonnais, maison Combes. ἒῥιοσο[7] Je vous ai adressé directement il y a longtemps huit exemplaires de la lettre à Renouard. Vous m’en aviez demandé pour en envoyer en Allemagne.


[1] La couverture de la traduction du Longus imprimée à Florence était bleue.  Note1
[2] Paraphrase du vers pris dans la confrontation entre Rodrigue et le père de Chimène dans le Cid.  Note2
[3] Feuilleton du Journal de l'Empire (1805-1814), rédigé par Julien Louis Geoffroy.  Note3
[4] Ville et rivière d'Attique dont les eaux étaient réputées sacrées. De nos jours, la ville a totalement disparu.  Note4
[5] Recueil en trois volumes d’Antonio Francesco Gori (1691-1757), né et mort à Florence, ecclésiastique, philologue et historien de l’antiquité.  Note5
[6] Les Cagliari sont une dynastie d’imprimeur-libraires installée à Rome qui débute au XVIIe siècle avec Tommaso I et couvre tout le XVIIIe.  Note6
[7] ἒῥιοσο = Jésus.  Note7

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