Paul-Louis Courier

épistolier, pamphlétaire, helléniste
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réponses aux anonymes

A près avoir purgé deux mois de prison, Courier radicalise sa posture contre le régime. Il attaque l’Église avec sa Pétition pour des villageois… Le Parquet de la Seine décide de poursuivre ce factum et de le saisir et va l’inculper d’avoir outragé le religion de l’État, la morale publique et religieuse ; d’avoir provoqué à la dissolution de l’ordonnance de la loi du 18 novembre 1814 concernant la célébration des fêtes et dimanches ; d’avoir attaqué la dignité royale et provoqué à la haine eu au mépris du gouvernement du roi ; d’avoir commis un outrage public envers les curés d’Azai et de Condé1 et d’avoir cherché à troubler la paix publique en excitant la haine et le mépris des citoyens contre la classe des jeunes prêtres.
Il s’en tirera avec une simple admonestation. Évidemment, il ne désarme pas – ce serait le mal connaître- mais prend désormais des précautions : il décide de publier clandestinement. Pas vu, pas pris ! A ceci près que son style inimitable ne trompe personne. Il va donc tirer à boulets rouges en artilleur qu’il fut sur la monarchie restaurée et l’Église. Ayant reçu de courageuses lettres non signées, il rédige coup sur coup deux textes, les Réponses aux anonymes.
Dans la première de ces lettres, conscient de la haine nourrie par la branche aînée des Bourbons pour la branche cadette – rappelons que Louis XVI fut condamné à mort à une voix de majorité et que son cousin, Philippe-Egalité, vota la mort- Courier met le fer dans la plaie : il dit tout le bien que le monarque, son frère, futur Charles X et leurs proches ne pensent pas de Louis-Philippe et des siens.

Il n’en reste pas à cette simple volée de bois vert administrée à la dynastie en place mais s’en prend aux racines du mal qu’il fait remonter au retour définitif des Bourbons. Déterminé à installer la paix sociale et donc attentif à naviguer pragmatiquement entre deux écueils que représentaient pour lui, d’un côté les ultras assoiffés de revanche, de l’autre les libéraux décidés à défendre les acquis de la Révolution, Louis XVIII avait « octroyé » la Charte à ses sujets. Le préambule de cet acte promulgué le 4 mai 1814 devant le Sénat en définit l’esprit. « La divine Providence, en nous rappelant dans nos États après une longue absence, nous a imposé de grandes obligations. La paix était le premier besoin de nos sujets : nous nous en sommes occupés sans relâche ; et cette paix si nécessaire à la France comme au reste de l'Europe, est signée. Une Charte constitutionnelle était sollicitée par l'état actuel du royaume, nous l'avons promise, et nous la publions… » Fondée sur le droit divin, la Charte affirme que la religion catholique est religion d’État et garantit un certain nombre de libertés publiques dont la liberté de la presse et la liberté des consciences. Courier fait voler en éclats ces deux symboles : dans la première lettre, il affirme qu’il a été leurré par la Charte, que celle-ci ne fut qu’une manœuvre politicienne, que cette pâle copie de régime constitutionnel à l’anglaise est une mystification et la liberté d’opiner un mot vide de sens. Dans la deuxième lettre parue au début de février 1823, il attaque à nouveau l’Église en renouant avec la lutte menée contre elle par les écrivains des Lumières. Pour ce faire, il s’empare d’une affaire atroce qui a défrayé la chronique : en Isère, dans la nuit du 8 au 9 mai 1822, un curé de vingt-sept ans passé d’un village de l’Isère avait assassiné une de ses paroissiennes après avoir tenté de lui faire subir les derniers outrages. Voulant faire flèche de tout bois, renouant avec le combat d’un Diderot, ne méconnaissant pas la brèche portée par une tradition vieille d’un bon demi-siècle provenant de certains membres de l’Église s’en prenant au principe du célibat des prêtres, conscient que la Révolution a joué un rôle non négligeable dans cette question, Courier éveille les esprits à cette problématique qui, selon lui, doit avoir une forte résonance dans ce qu’il convient, de manière anachronique, d’appeler « l’inconscient collectif »



[1] En réalité, il s’agit de Fondettes, près de Luynes.  Note1

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